
Quelque chose serait-il en train de changer dans la commune de Carthage ? On serait tenté de le croire. En tout cas on l’espère.
Le 11 avril dernier, l’Association des Amis de Carthage, en permanence mobilisée pour détecter et dénoncer les dépassements dans le périmètre communal pouvant nuire au patrimoine historique, archéologique ou environnemental, adressait un courrier à la mairie de Carthage pour « signaler une construction en cours sur un terrain archéologique non aedificandi sis dans la zone de Bir Ftouha ».
Pour mémoire, rappelons que ce terrain s’intègre dans un vaste périmètre du « parc archéologique Carthage-Sidi Bou Saïd » classé patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco. A ce titre, ce parc est protégé et soumis à la réglementation de sauvegarde nationale et internationale en matière d’aménagement du territoire. En particulier en matière de bâti. C’est ainsi qu’ont été délimitées des superficies « sanctuarisées » parce que considérées comme pouvant receler des vestiges. Parmi celles-ci, le lieu-dit Bir Ftouha, dans lequel ont été effectuées des découvertes majeures de la métropole antique dès la fin du XIX° siècle.
A l’ère de tous les trafics sous le règne de Ben Ali, il a été procédé au déclassement du périmètre de Bir Ftouha pour permettre son lotissement à des fins immobilières au profit de l’entourage présidentiel. Au lendemain de la Révolution, il a été procédé au reclassement des lots devenus propriétés privées mais non encore bâtis. Du coup, ils sont redevenus non constructibles.
Le propriétaire est revenu à la charge
avec, cette fois-ci, de gros moyens,
des engins lourds pour aller vite en besogne
La parcelle visée par la démarche des Amis de Carthage a déjà fait l’objet d’une tentative d’aménagement derrière une clôture rapidement érigée pour soustraire l’opération aux regards indiscrets. La manœuvre a immédiatement été dénoncée par la société civile. Il s’en est suivi un arrêté de démolition, exécuté en 2021. Mais ne voilà-il pas que, profitant du long week-end de l’aïd passé, le propriétaire du terrain est revenu à la charge avec, cette fois-ci, de gros moyens, des engins lourds pour aller vite en besogne, coulant des fondations et des dalles en béton, espérant mettre tout le monde devant le fait accompli.
Jeudi 17 avril dernier, « après une campagne menée sur les réseaux sociaux et une plainte » déposée devant les autorités judiciaires, la municipalité a, elle aussi, utilisé de gros moyens pour mettre fin à l’infraction par la démolition des installations mises en place par le contrevenant. La plainte, elle, a été maintenue par l’association qui a exigé qu’une enquête pour d’éventuelles déprédations soit diligentée par les services compétents. Une hirondelle ne faisant pas nécessairement le printemps de ces derniers jours, il est cependant permis d’espérer que quelque chose a bougé à Carthage. Avis à tous les contrevenants !